Toutes les filles s’appellent Jeanne
Lina Bellard a rassemblé les éléments d’une légende qu’elle confronte à des souvenirs de famille, à divers collectages et récits de village.
Traditions, témoignages et réminiscences de chants anciens se mêlent aux éclats des trois harpes et aux échos des archives sonores. La musique, les gestes de l’artiste, sa voix chantée et parlée, ses silences se mêlent en une danse rituelle propre à faire surgir une réalité légendaire.
Les spectateurs-témoins assemblés autour d’elle sont les catalyseurs de l’opération : chacun y joue de son imaginaire. Sans séparation, la scène et la salle dessinent le champ d’expérience dans lequel apparaissent des évènements et des personnages singuliers, aux accents teintés d’ironie et de nostalgie.
Lina Bellard : compositions, textes, harpes & voix
Guillaume Tahon : son et réalisation électroacoustique avec le logiciel Logelloop
Sébastien Bouclé : création lumière
Didier Kowarsky : regard extérieur, conseiller artistique
Création 2016
Production : Cie Kolam Dic’hortoz (35)
Coproduction : Centre Culturel Pôle Sud, Chartres de Bretagne (35) – UPCP Métive, Parthenay (79). Avec les soutiens financiers : DRAC Bretagne, Ville de Rennes, Adami.
Toutes les filles s’appellent Jeanne est un spectacle de musique et récits proposé en multidiffusion dans un espace circulaire transformant le rapport frontal habituel scène-public.
La Musique
À l’origine de chaque pièce instrumentale, il y a un air traditionnel, souvent une chanson populaire. En parallèle, il y a une passion pour les traditions instrumentales orientales de musique modale, qui nourrit au quotidien le travail de Lina Bellard. En effet, il n’existe pas en France de tradition populaire d’instrument à cordes pincées, contrairement à toutes les traditions de luths et cithares transmises depuis des siècles dans d’autres régions du monde. N’oublions pas que les techniques de jeu connues et transmises de la harpe celtique, instrument réinventé dans les années 50, ont été en majeure partie une transposition de celles enseignées sur la harpe classique.
Echelles modales comprenant des intervalles inégaux (autres que les «tons» et «demi-tons»), rythmes et pulsations asymétriques, improvisations modales, techniques de jeu inspirées de différentes traditions instrumentales du monde, chant traditionnel de haute et basse Bretagne, etc, sont autant de composants qui définissent l’univers musical de Lina Bellard.
Le Récit
Le récit est porté à la fois en direct par la voix de la musicienne et par la diffusion d’extraits d’archives de voix parlée, issu de la médiathèque de Dastum (Centre de sauvegarde du patrimoine oral de Bretagne) et préenregistrés à l’occasion d’un collectage familial en Dordogne.
L’élément déclencheur du collectage a été d’un côté un grand intérêt pour la couleur musicale de la voix parlée et de l’autre le désir de récolter quantité de versions de la légende du Lébérou. Cette légende met en scène les mésaventures d’un homme ou d’une femme qui, suite à une malédiction, se transforme chaque nuit en une bête sauvage s’apparentant à un gros lièvre. Pour ne pas conserver sa peau d’animal le jour également, il doit chaque nuit passer sous sept clochers avant l’aube et pour s’économiser il se fait transporter en sautant sur le dos des quelques passants effrayés.
Mais au fur et à mesure de la collecte c’est autre chose qui est apparu : souvenirs, événements, comportements, personnages d’où s’est dégagés une tension dramatique, un mystère, un thème mythique, quelque chose d’insaisissable et fuyant, un questionnement artistique, qui ont donnés lieu à une déconstruction de la quête initiale. La fonction de l’Homme-Lièvre légendaire que tout le monde connait mais sur lequel personne n’a rien à dire, et dont il n’y a pas de traces visibles semblait s’apparenter au secret de famille. De tous ces « lièvres soulevés » s’est édifiée une forme artistique pluridisciplinaire : musicale, narrative, scénographique, avec traitement et spatialisation du son.
Toutes les filles s’appellent Jeanne parle du Lébérou mais aussi de la filiation au sens large tout en invitant l’auditeur a apprécier la poésie et la musicalité des mots en se détachant du sens.
Le lien électroacoustique
Guillaume Tahon, en tant qu’ingénieur du son et créateur sonore, forme un véritable duo invisible avec la harpiste. Acteur d’une création musicale instantanée il puise en temps réel dans la matière sonore générée en live pour lui donner une deuxième dimension via le logiciel Logelloop. Traitements, déformations, manipulations et accumulations viennent livrer un tapis sonore au service de la musique et du récit.
Configuration scénique
L’espace scénique est construit dans une volonté de proximité avec les auditeurs. Les spectateurs sont assis au centre d’une ellipse avec la musicienne et ses harpes. La diffusion se fait en multidiffusion 6.2 autour du public qui profite ainsi des sources sonores. Le spectateur est ainsi au centre du son, en immersion complète dans l’univers sonore intimiste et enveloppant. Cette configuration peut être installée sur la scène d’une salle de spectacle ou bien dans une salle où le noir complet peut être assuré et d’une dimension minimale de 10 mètres sur 12 mètres.